Suivi et évaluation des programmes de vaccination

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Le suivi et l’évaluation des programmes de vaccination reposent en partie sur la mesure de la couverture vaccinale. Il existe différents outils d’évaluation de la couverture vaccinale en France.

Les outils directs permettent de mesurer la couverture vaccinale. Il s’agit :

  • de l’exploitation en routine de certificats de santé de l’enfant, en particulier ceux des enfants de 2 ans ;
  • des enquêtes périodiques par sondage en milieu scolaire ;
  • plus ponctuellement, des enquêtes locales ou nationales réalisées par sondage en population générale ou dans des groupes spécifiques de la population.

Les outils indirects permettent de suivre les tendances de la consommation de vaccins au cours du temps et donc d’estimer indirectement la couverture vaccinale. Il s’agit :

  • des ventes de vaccins aux pharmacies ;
  • des données de remboursement de vaccins par l’Assurance maladie. Certaines données de remboursement permettent également un calcul direct de la couverture vaccinale.

Les méthodes d’évaluation directe

À l’âge de 2 ans : certificats de santé de l’enfant

À l’âge de 2 ans, la couverture vaccinale est suivie via l’analyse des certificats de santé du 24e mois. Le certificat est rempli pour chaque enfant par le médecin lors de l’examen obligatoire du nourrisson au 24e mois. Ce certificat comporte une rubrique « vaccination » dans laquelle doivent être reportées toutes les vaccinations effectuées.

Le praticien réalisant l’examen ou la famille adresse ce certificat dûment rempli au médecin responsable du service départemental de protection maternelle et infantile (PMI), sous pli confidentiel et fermé.

L’exploitation des certificats de santé est effectuée dans chaque département par les services départementaux de PMI qui en transmettent les résultats et les fichiers de données à la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère de la santé (Drees).

Depuis 2004, les données fournies à la Drees sont des données individuelles anonymisées indiquant le statut vaccinal mais aussi certaines données sociodémographiques propres à chaque enfant. La Drees compile et traite les données. Les fichiers constitués des données vaccinales et sociodémographiques sont ensuite transmis à Santé publique France pour vérification et analyse.

Les analyses concernent les vaccinations à effectuer avant l’âge de 2 ans et mentionnées sur les certificats du 24e mois, à savoir :

  • les deux doses avant l’âge de 6 mois et le rappel à 11 mois (depuis 2013) pour le vaccin contre la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, la coqueluche, l’Haemophilus influenzae b, les infections invasives à pneumocoque et l’hépatite B ;
  • l’injection unique de vaccin BCG recommandée dès la naissance (ou à partir de 1 mois de vie depuis 2017) chez les enfants considérés à risque de tuberculose ;
  • les première et deuxième doses pour le vaccin contre la rougeole, la rubéole et les oreillons recommandées respectivement à 12 mois et entre 16 et 18 mois.

Les certificats de santé, renseignés par les médecins, constituent un bon outil d’évaluation de la couverture vaccinale du nourrisson, permettant de suivre les tendances historiques et de réaliser des comparaisons annuelles. De plus, ces couvertures vaccinales dites « de routine » sont collectées chaque année à travers un dispositif pérenne intégré dans le fonctionnement du système de santé. Ces données, à vocation exhaustive, sont disponibles à l’échelon départemental, ce qui permet d’étudier les variations spatiales des couvertures vaccinales.

Cette source de données présente cependant des limites :

  • délai long entre l’acte vaccinal et la disponibilité de l’information : le temps nécessaire à la diffusion des données après remplissage du certificat de santé est d’environ deux ans, du fait des différentes étapes de saisie au niveau des départements, de transfert et de traitement des données au niveau national ;
  • outil peu réactif aux changements du calendrier vaccinal : tout changement nécessite l’impression de nouveaux certificats, leur mise en circulation, puis leur utilisation. Ceci explique, par exemple, l’absence de données issues de cette source pour le vaccin contre le méningocoque C, alors que ce vaccin a été introduit dans le calendrier vaccinal en avril 2010 ;
  • participation des départements à la remontée d’information insuffisante et en diminution dans certaines régions : en 2015, 93 départements seulement ont fait remonter les données des certificats du 24e mois, ce qui représente un frein pour l’estimation de données à l’échelon régional ;
  • tous les certificats de santé des enfants ne sont pas transmis aux services départementaux.

Au total, les certificats dont les informations sont collectées et transmises au niveau national concernent environ 30% des enfants de la classe d’âge (232000 certificats du 24e mois en 2015).

À noter que les données vaccinales contenues dans les certificats de santé du 9e mois sont également analysées, mais ces données présentent moins d’intérêt pour l’étude de la couverture vaccinale.

Entre 6 et 16 ans : enquêtes scolaires

En 2000 a été mis en place un cycle triennal d’enquêtes en milieu scolaire ayant pour objectif d’estimer des indicateurs permettant de suivre l’état de santé des enfants. Ces enquêtes, menées par les infirmières et les médecins scolaires, sont coordonnées par la Drees en collaboration avec le ministère de l’Éducation nationale (direction générale de l’Enseignement scolaire – DGesco et direction de l’Évaluation, de la Prospective et de la Performance – DEPP) et Santé publique France. Chaque année, jusqu’en 2012, une enquête était réalisée alternativement auprès d’une des trois générations d’enfants des classes de grande section de maternelle (enfants âgés d’environ 6 ans), de cours moyen 2e année (11 ans) et de classe de 3e (15 ans).

Les échantillons sont constitués en utilisant un sondage à deux degrés. Dans un premier temps, un échantillon d’écoles publiques et privées est tiré au sort, stratifié sur un certain nombre de variables (académie d’appartenance, statut public ou privé, etc.). Puis, dans chaque école, des élèves sont tirés au sort. Les questions portant sur la vaccination sont complétées à partir du carnet de santé de l’élève et notées sur un formulaire. Les données sont saisies et redressées par la Drees, puis analysées par Santé publique France.

Ces enquêtes représentent un outil important de mesure de la couverture vaccinale chez le grand enfant, notamment parce qu’elles ont lieu à des périodes clés du développement de l’enfant (entrée à l’école primaire, préadolescence et adolescence).

Par ailleurs, le dispositif permet, d’une part, une comparaison de la couverture vaccinale d’enfants du même âge entre deux enquêtes (par exemple ROR chez les enfants de 6 ans évalués en 2002-2003, puis en 2005-2006 et en 2012-2013), d’autre part, une comparaison des couvertures vaccinales pour une même génération d’enfants enquêtés à deux âges différents (exemple couverture ROR chez les enfants nés en 1996-1997 mesurée à 6 ans en 2012-2013 et à 11 ans en 2007-2008).

Ces enquêtes permettent d’obtenir des données au niveau national, mais seules les enquêtes menées en grande section de maternelle ont une taille d’échantillon suffisante pour obtenir des estimations au niveau régional. En outre, ces enquêtes permettent l’identification de déterminants de vaccination grâce aux informations sociodémographiques qui sont également recueillies.

Les enquêtes scolaires constituent cependant un dispositif lourd qui nécessite notamment un fort investissement en temps et en ressources à toutes les étapes de leur réalisation. C’est pourquoi un espacement du rythme des enquêtes (une enquête tous les deux ans, soit une enquête dans chaque niveau tous les six ans) a été mis en place depuis 2012, afin de réduire la charge de travail des personnels impliqués et de réaliser des exploitations plus approfondies des autres informations collectées (audition, vision, accidents de la vie courante, etc.).

À côté de ce cycle d’enquêtes scolaires nationales, des enquêtes ponctuelles chez cette catégorie d’enfants sont réalisées de façon épisodique.

Ainsi, par exemple, une enquête de couverture vaccinale a été menée en mars 2009, en Guyane, chez les enfants scolarisés en cours préparatoire, en classes de 6e et de 3e.

Une enquête de couverture vaccinale a également été réalisée à Mayotte, en 2010, chez les enfants âgés de 7-10 ans et de 14-15 ans.

À tout âge : enquêtes par sondage

Enquête décennale Insee et enquête Irdes

Jusqu’en 2008, la couverture vaccinale nationale contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite était mesurée essentiellement grâce à l’enquête décennale sur les conditions de vie Sesi-Insee ou l’enquête décennale menée par l’Insee environ tous les dix ans.

Elle est maintenant estimée à travers les enquêtes menées par l’Irdes (Institut de recherche et documentation en économie de la santé) environ tous les deux ans qui inclut des questions vaccinales adjointes au questionnaire environ tous les dix ans.

Dans cette enquête (Enquête santé et protection sociale – ESPS), l’échantillon d’environ 20000 personnes est représentatif de la population couverte par les trois principaux régimes d’Assurance maladie (régime général, Mutualité sociale agricole et régime des professions indépendantes, soit 95% de la population générale). Les dernières données vaccinales sont celles de l’enquête de 2012.

Autres enquêtes par sondage

D’autres enquêtes par sondage sont parfois nécessaires lorsque des données de couverture vaccinale ne peuvent être obtenues par d’autres sources. Elles sont conduites à différentes échelles géographiques (nationale, régionale ou départementale) ; elles peuvent cibler différents groupes d’âge, s’adresser à certaines catégories socioprofessionnelles spécifiques et utiliser des techniques de sondage plus ou moins élaborées, allant parfois jusqu’à des sondages complexes à plusieurs degrés et avec différents niveaux de stratification.

Plusieurs enquêtes ponctuelles ont été réalisées ces dernières années par Santé publique France en collaboration avec d’autres institutions, notamment sur la vaccination contre la grippe chez les résidents et les professionnels des Ehpad en 2008, sur la vaccination BCG chez les enfants cibles des nouvelles recommandations vaccinales en 2009, ou sur les vaccins recommandés chez les soignants travaillant dans les hôpitaux et les cliniques de France, ainsi que chez les étudiants en santé en 2008 et 2009.

La couverture vaccinale contre la grippe est estimée chaque année par l’Assurance maladie à partir des bons de prise en charge envoyés aux personnes de 65 ans et plus, ainsi qu’aux autres personnes de moins de 65 ans cibles de la vaccination (personnes en ALD ou atteintes d’asthme ou de BPCO, etc.).

Les enquêtes par sondage ont l’avantage de pouvoir être adaptées au type d’information recherché et de fournir des données très complètes et de qualité lorsque l’enquête est bien conçue. Elles nécessitent des compétences en épidémiologie et en statistiques pour la réalisation d’un plan de sondage adéquat et une analyse adaptée. Elles sont cependant consommatrices de temps et peuvent être coûteuses.

Evaluation indirecte de couverture vaccinale : données de vente et de remboursement

Données de vente

Les données exhaustives des ventes de vaccins aux officines sont fournies par le Groupement pour l’élaboration et la réalisation de statistiques (Gers) et analysées par Santé publique France. Elles peuvent être considérées comme reflétant les ventes de vaccins aux particuliers. Ces données ne constituent qu’un indicateur indirect de couverture vaccinale, notamment parce qu’elles ne sont pas déclinées par âge, et surtout parce qu’elles ne se rapportent pas à une population cible, c’est-à-dire à une population qui aurait dû recevoir une vaccination (le dénominateur nécessaire au calcul de la couverture vaccinale).

En revanche, leur fréquence de remontée mensuelle et leur déclinaison géographique fine les rendent utiles pour suivre les grandes tendances de l’état vaccinal dans la population à différentes échelles géographiques, ainsi que pour participer à l’évaluation d’impact à l’échelon régional de campagnes de vaccination.

En Île-de-France, cet indicateur a été utilisé dans le suivi de l’impact sur la couverture vaccinale du remplacement de la multipuncture par le BCG intradermique en janvier 2006, ainsi que dans le suivi de l’impact de la suspension de l’obligation vaccinale BCG en juillet 2007.

Ces données de vente ont vocation à être remplacées par les données de remboursement des vaccins qui sont de plus en plus utilisées pour produire des estimations de couverture vaccinale.

Données de remboursement

Les données de remboursement constituent également un indicateur indirect puisqu’elles sont basées sur la dispensation et non l’administration des vaccins. Elles proviennent du Système national d’informations inter-régimes de l’assurance maladie (SNIIRAM) mis en œuvre par la Cnamts depuis 2003.

Actuellement, deux sources de données issues du SNIIR-AM sont utilisées par Santé publique France :

  • l’Echantillon généraliste des bénéficiaires (EGB) qui inclut des données individuelles sur la base d’un échantillonnage aléatoire des affiliés des différents régimes de l’Assurance maladie ;
  • le Datamart de consommations inter-régimes (DCIR) qui correspond aux données individuelles exhaustives du SNIIR-AM, incluant l’ensemble de la population française.

Ces sources de données permettent de disposer d’un numérateur et d’un dénominateur, et présentent l’avantage, par rapport aux données de ventes de vaccins, de permettre l’estimation des couvertures vaccinales à un âge donné, à un échelon national et régional pour l’EGB, et jusqu’à un niveau départemental voire infra-départemental à partir des données du DCIR.

Dans le cadre de la création du Système national des données de santé (SNDS), fichier regroupant les principales bases de données de santé publiques, l’historique de consultation des données du DCIR a été récemment étendu à dix ans, ce qui permet la construction de données historiques chez les enfants.

Les données de l’EGB et du DCIR sont utilisées depuis 2011 pour estimer la couverture vaccinale contre le HPV des jeunes filles, ainsi que la couverture de la vaccination contre le méningocoque C chez les personnes de 1 à 24 ans, tranche d’âge ciblée par les recommandations vaccinales. Pour cette dernière vaccination, les estimations incluent les enfants à l’âge de 2ans, puisque cette valence ne figure pas dans le certificat de santé du 24e mois.

Cette source de données permet également la production d’indicateurs de couverture vaccinale de façon beaucoup plus réactive que les certificats de santé, puisqu’un délai de seulement trois à quatre mois est nécessaire pour la consolidation et le traitement des données versus au moins dix-huit mois pour les certificats de santé.

Les données du SNIIRAM présentent cependant des limites dans certains départements, puisque, selon leurs modes d’achat et de remboursement, les vaccinations administrées dans les centres de protection maternelle et infantile (PMI) ne sont pas toujours incluses dans les données du SNIIRAM. Par exemple, les vaccins ne peuvent pas être rattachés aux bénéficiaires lorsque les vaccins font l’objet d’un achat groupé par les départements auprès des firmes ou que leur remboursement par l’Assurance maladie se fait sur une base agrégée. Une méthodologie utilisée pour produire ces estimations à partir du DCIR et prenant en compte ces limites est en cours de validation par Santé publique France.