Clinique
La coqueluche est une infection bactérienne très contagieuse de l’arbre respiratoire, peu ou pas fébrile, d’évolution longue. La gravité de la maladie est liée à ses complications pulmonaires et neurologiques, touchant surtout les jeunes nourrissons et pouvant conduire à des séquelles voire au décès. Parmi ces complications, les quintes asphyxiantes avec malaises graves et la « coqueluche maligne » sont l’apanage des nourrissons de moins de 3 mois non immunisés. Cette dernière se traduit par une détresse respiratoire avec hypertension artérielle pulmonaire, hyper-lymphocytose majeure suivie d’une défaillance multiviscérale. Cette forme, rend compte de la quasi-totalité des décès déclarés liés à la coqueluche chez les enfants.
Le tableau clinique de la coqueluche est très variable selon l’âge et le degré de protection de l’individu. La maladie débute par des signes discrets d’infection des voies respiratoires supérieures : rhinite, toux légère puis toux qui se modifie et se prolonge au lieu de s’améliorer.
Le diagnostic de coqueluche doit être évoqué devant une toux évoluant depuis plus de sept jours sans cause évidente, surtout si la toux est spasmodique à prédominance nocturne, survenant de façon paroxystique, souvent quinteuse : accès violents et répétés de toux aboutissant à une reprise inspiratoire difficile avec vomissements, parfois à une turgescence du visage, rougeur conjonctivale, accès de cyanose et une reprise inspiratoire en fin de quinte sonore et comparable au chant du coq. À noter que le chant du coq peut être absent chez le jeune nourrisson, les adultes et les sujets anciennement vaccinés. L’absence de fièvre et d’autres signes respiratoires sont également possibles. Entre les accès de toux et les quintes, le sujet est asymptomatique. La survenue d’autres cas dans l’entourage du patient reste un indicateur important.
Le diagnostic biologique s’appuie sur le prélèvement par écouvillonnage ou aspiration nasopharyngée. La confirmation biologique repose sur la PCR en temps réel (PCR-TR) qui est positive dans les trois premières semaines de la maladie, ou la culture qui sera positive dans les quinze premiers jours de la maladie. Le diagnostic plus tardif repose sur un lien épidémiologique avec un cas confirmé. Lorsque la durée de la toux est supérieure à vingt et un jours, le diagnostic est avant tout clinique. La sérologie n’a plus sa place dans la stratégie diagnostique et elle n’est plus remboursée en France.
La transmission, strictement humaine, est aérienne et s’effectue par contact avec un sujet malade qui tousse. La maladie se transmet d’autant plus que l’exposition est répétée dans un espace limité et clos. La contagiosité est maximale au début de la maladie, pendant la phase catarrhale, puis diminue avec le temps. Le taux d’atteinte secondaire peut aller jusqu’à 90% chez les contacts familiaux non immuns, puis diminue tout en persistant pendant les trois premières semaines. La période de contagiosité peut être considérée comme nulle après trois semaines d’évolution sans traitement antibiotique ; elle est ramenée à cinq, voire trois jours, si un traitement par un macrolide est mis en œuvre (trois jours si traitement par azithromycine). La durée de protection après la maladie naturelle est estimée à douze-quinze ans. L’immunité conférée par le vaccin est également de durée limitée d’où la nécessité de rappels. Cette perte progressive de l’immunité chez l’enfant et l’adulte anciennement vaccinés explique la grande variabilité observée dans l’expression de la maladie.
Les personnes à risque sont susceptibles de faire des formes graves de coqueluche ou de décompenser une pathologie sous-jacente. Il s’agit des nourrissons non protégés par la vaccination, des personnes souffrant de pathologies respiratoires chroniques (asthme, broncho-pneumopathies chroniques obstructives, etc.), des personnes immunodéprimées et des femmes enceintes. Le risque de transmission nosocomiale en service de néonatologie ou en maternité est donc important et la vigilance doit y être multipliée.
Même s’il existe un passage placentaire des anticorps anticoquelucheux naturels, la plupart des nourrissons ne sont pas protégés contre la maladie clinique pendant les premiers mois de vie, à moins que leur mère n’ait été vaccinée pendant la grossesse et ce, en raison probablement de l’insuffisance du titre d’anticorps transférés.
De même, la coqueluche survenant dans les premiers mois de vie est considérée comme peu immunisante, la vaccination reste donc nécessaire chez ces nourrissons.
Le contrôle de la maladie repose sur :
- la détection précoce des cas et leur traitement ;
- la prophylaxie pour les personnes fragiles exposées (essentiellement le nourrisson non vacciné et les personnes à risque) ;
- l’éviction du cas de la collectivité fréquentée pendant cinq jours après le début d’un traitement antibiotique adapté (trois jours si azythromycine) ;
- la mise à jour de la vaccination des contacts proches selon les recommandations vaccinales ;
- l’information de la population exposée et une surveillance active de trois semaines après la fin de la contagiosité du dernier cas identifié.
La conduite à tenir autour d’un ou plusieurs cas de coqueluche est précisée sur les sites du ministère de la Santé et du Haut Conseil de la santé publique.
Epidémiologie/Couverture vaccinale
Depuis 1986, la coqueluche ne fait plus partie des maladies à déclaration obligatoire (DO) mais reste à signaler à l’agence régionale de santé (ARS) dans deux situations spécifiques :
- dans le cadre du signalement des infections nosocomiales (prévenir l’équipe opérationnelle d’hygiène (EOH) et signalement via l’outil web de signalement e-SIN) ;
- lors de la survenue de cas groupés (à partir de 2 cas).
Le centre national de référence (CNR) assure l'expertise microbiologique des souches isolées.
La surveillance des cas confirmés pédiatriques vus à l’hôpital a été reprise à partir de 1996 par le réseau hospitalier Renacoq de pédiatres et de bactériologistes. Ce réseau regroupe 42 centres hospitaliers pédiatriques. Jusqu’à présent, il n’y a pas de surveillance systématique de la coqueluche « en ville » mais, depuis janvier 2017, le réseau Sentinelles a inclus la coqueluche dans sa surveillance, auprès de ses médecins sentinelles.
La surveillance repose sur l’identification des cas qui doivent répondre à l’une des trois définitions de cas suivantes :
- cas clinique : toux quinteuse de plus de quatorze jours évocatrice de coqueluche, reprise inspiratoire difficile ou chant du coq ou apnées ou accès de cyanose ou vomissements après les quintes ou hyperlymphocytose ;
- cas confirmé biologiquement : toux de huit jours et plus avec quintes évocatrices et une preuve de l’infection par isolement de Bordetella par PCR ou culture positive sur l’aspiration nasopharyngée ;
- cas confirmé épidémiologiquement : patient suspect de coqueluche dont l’un des contacts dans les trois semaines avant le début de sa toux a été confirmé biologiquement par PCR ou culture (contaminateur potentiel du cas épidémiologique), ou si une personne en contact avec lui pendant sa période de contagiosité a présenté des signes suspects de coqueluche ayant été confirmés au laboratoire par PCR ou culture (cas secondaire du cas épidémiologique).
Les cas groupés de coqueluche (au moins 2 cas, contemporains ou successifs, survenant dans la même unité de lieu) doivent être signalés aux agences régionales de santé (ARS). Afin de faciliter le recueil de données et l’analyse des cas groupés, des modèles de fiches sont disponibles sur le site de Santé publique France. Qu’il y ait un ou plusieurs cas de coqueluche confirmés, des mesures de contrôle sont appliquées individuellement à chaque cas. Plus la population à risque est élevée, plus l’intervention doit être rapide. Les cas groupés restent cependant des événements attendus parmi les personnes qui ne sont pas ou plus protégées par la vaccination : nourrissons ou personnes dont le dernier rappel vaccinal remonte à plus de cinq ans.
En France, la coqueluche continue à circuler avec des cycles épidémiques. Les décès sont rares mais touchent dans plus de 90% des cas les nourrissions de moins de 6 mois et plus spécifiquement les moins de 3 mois, essentiellement contaminés par leur entourage familial.
Santé publique France a signalé une recrudescence de la coqueluche sur le territoire depuis le début de l’année 2024. Les dernières données publiées au 2 juin 2024 confirment la résurgence de la maladie en France avec déjà plus de cas rapportés sur les cinq premiers mois de l’année que pour 2023.
Un DGS-Urgent « Intensification de la circulation de la coqueluche en France et en Europe » a été publié le 7 juin 2024 sur la prévention et la conduite à tenir.
Les données de surveillance sont disponibles sur le site de Santé publique France
Au niveau européen, l’ECDC recensait 25 130 cas de coqueluche en 2023 contre 32 037 cas entre le 1er janvier et le 31 mars 2024.